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11 mars 2007

Ce n'est pas tous les jours Noël.

Arnaldur Indridason

La Voix

Métailié

Traduit de l'islandais par Eric Boury

ISBN 978-2-86424-600-8

Scriver:

Dans un hôtel de luxe de Reykjavik, un portier faisait office de père Noël pour la période des fêtes de fin d’année est retrouvé assassiné à coups de couteau dans un cagibi qui lui servait de « chambre » depuis plusieurs années, dans la cave de l’établissement. Il est en outre dans une posture délicate, avec un préservatif sur lequel on relève des traces de salive. Il venait aussi d’être licencié. L’enquête, menée par l’inspecteur Erlendur, à la vie personnelle assez chaotique, fait vite apparaître que la victime est un ancien « enfant star » à la Shirley Temple, à savoir qu’il avait, étant jeune, une voix merveilleuse qui lui a permis de connaître une célébrité aussi grande que fugitive, à cause d’une mue précoce. Ses rapports avec un père tyrannique ont contribué à faire de sa vie un enfer et un échec total (cet aspect de l’action est mis en relief par une enquête parallèle sur un cas de violences à enfant, pour souligner que le problème est toujours actuel). On trouve également trace d’un rendez-vous qu’il a eu, la veille de son décès, avec un Anglais grand collectionneur de disques rares mais qui a aussi eu maille à partir avec la Justice pour des affaires de pédophilie. La suite de l’enquête fait apparaître nombre de turpitudes : mensonges grands et petits, secrets de famille, trafics en tous genres, chantages, jalousies, etc. Mais le secret de l’énigme est surtout le manque d’amour, l’indifférence à autrui et à son individualité, dans un monde cruel et cynique. Le livre met tout cela en relief mais sans négliger, bien au contraire, une analyse des mécanismes psychologiques qui en sont la cause et sont à base de traumatismes et de refoulement. Que faisons-nous de nos enfants, ne cesse de nous demander l’auteur, en déployant de multiples et subtiles variations sur ce thème. C’est dire qu’on dépasse de beaucoup, comme souvent maintenant, le roman policier au sens strict au profit d’un livre passionnant, enrichissant et émouvant, bien écrit et bien traduit. Félicitons aussi l’éditeur d’avoir respecté, après La Cité des Jarres et la Femme en vert, l’ordre de publication des aventures de l’inspecteur Erlendur en langue originale (c‘est si rare qu’on est obligé de le mentionner spécialement) : la cohérence du personnage apparaît ainsi à la fois graduellement et de façon fort convaincante.

Public : adultes

Essentiel : oui, dans sa catégorie

[ Précédemment publié dans le Bulletin critique du livre français ]



Septembravec:

Dans Le Canard enchaîné ( 21 février 2007), Jean-Luc Porquet se déchaîne presque: " Avec La Voix (...), l'Islandais Arnaldur Indridason livre son troisième polar: tranchant, tendu, neigeux, sombre comme un jour de Noël sans pain". C'est qu'il adore ça, quand "ce n'est pas tous les jours Noël". Et il ajoute: "Le commissaire Erlandur fait curieusement penser à un autre inspecteur, mais italien celui-là, l'attachant Duca Lamberti du regretté Giorgio Scerbanenco - ses colères froides, ses violents écoeurements lorsqu'il est confronté aux plus noires saloperies humaines".

Docteur éric et mystère birdie a aussi aimé: "les ambiances sont lourdes à souhait"; "gai comme un pinson islandais". Il précise: "On notera tout de même que ce dernier opus se veut plus léger. Là où, précédemment, il traversait le pays de part en part en écoutant les témoignages les plus atroces, Erlendur décide dans La Voix de reposer sa fatigue. Il s'installe dans une chambre sans chauffage que le directeur de l'hôtel consent à lui céder et fait venir à lui les divers suspects de cette histoire d'enfants stars tombés dans l'oublie. Cette position devient presque drôle, allégeant tout au moins la noirceur du propos, tant le défilé est bigarré".

Mickaël Dernets, sur Evene, est un autre fan: "Très noir, saupoudré d’un humour grinçant, le récit d’Indridason laisse errer son enquêteur bourru, presque antipathique, qui a l’air encore plus paumé que les cadavres qu’il trouve". On s'interroge quand même sur les polars qu'il a lus: "Un père Noël percé de plusieurs coups de couteau, surpris en délicate position : sexe au vent, préservatif encore enfilé. Difficile de faire plus glauque."

Quant au traducteur de La Voix, Eric Boury, sur son blog (et bien entendu, dans un post daté du 24 décembre), il se retranche précautionneusement derrière l'avis de France Inter, incarné pour l'occasion par Christine Siméone: "Eh bien, en tous cas, j'ai une fort mauvaise nouvelle. Je suis désolée mais le Père Noël a été assassiné. On vient de le retrouver mort dans le sous-sol d'un grand hôtel islandais alors le commissaire Erlendur a été dépêché sur place pour mener l'enquête. Voilà, je vous parle de La Voix, c'est un roman noir qui commence de manière très classique et conventionnelle mais l'intrigue policière est prétexte à reconstituer la vie du Père Noël : il fut portier d'hôtel, il a été chanteur prodige aussi, je ne vous en dis pas plus... Le Père Noël est mort mais je crois que vous avez ce qu'il faut pour remplir votre hotte. Voilà, La Voix, c'est chez Métailié et c'est signé Arnaldur Indridason." Et si ce blog ne comporte pas beaucoup de notes, l'une d'entre elles est un très beau poème de Kristín Ómarsdóttir sur les jours de pluies tiré d'un recueil intitulé T'es pas la seule à être morte ( éd. Le Cavalier bleu, 2003 ), livre dont Eric Boury est aussi le traducteur.



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