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19 juillet 2006

Saga America

Une veuve de papier

John Irving

Editions du Seuil, avril 1999

582 pages, ISBN : 2020334933

Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Josée Kamoun.

"Je vous mets au défi de trouver un défaut à ce roman".[1 ] Ca commence mal, parce que des défauts, il y en a, le livre n'est pas "parfait". [1] Non, on ne peut certainement pas dire que "Il n'y a rien, absolument rien qui cloche." [1]

Et la plus grosse faiblesse de ce pavé vient de ce que Irving donne l'impression de traire une généreuse vache à lait, il tire et étire l'histoire dans  "une profusion de détails" [1] où on ne se perd pas, certes, mais dont on n'a souvent que faire et qui font que moi aussi "j'ai parfois trouvé ça long à lire." [1]

A part ça, c'est vrai, "Irving a su rendre les personnages vivants tellement ils sont bien décrits." [1] On peut en effet parler de "un roman de personnages. [...] avec toute une dimension. L'histoire d'une vie, de plusieurs vies, sur plusieurs années." [1], roman à la Auster, par certains côtés, avec "plusieurs histoires en parallèle" [1], de l'humour, pas très fin mais distrayant et qu il n'était sûrement pas facile de faire sur "un sujet difficile (la perte d'un enfant)" [1].

J'ai lu à propos de Irving que "On ne s'étonnera [donc] pas de trouver peu de sexe et peu de drogue dans la plupart de ses romans" [2]. Alors celui-ci est différent, car du sexe il y en a, c'est même, ô surprise, un des thèmes centraux du roman, et son point de départ. Mais, et peut-être faut-il voir là un manque d'habitude à traiter de ce sujet, on pourra déplorer le côté hussard des passages qu'il y consacre. Le kama-sutra, ce n'est pas son rayon, ça c'est sûr. On  l'imagine mal, sur ce thème "écrivant et réécrivant sans cesse en essayant d'améliorer chaque ligne, cherchant toujours le mot juste et le style qui convient." [2], pratique qui aurait eu, dans le cas précis, l'avantage de l'amener à dépasser sa seule "verve [...] parfois polissonne" [3] .

A propos de la fin, on peut comme Philippe-Jean Cattinchi dans Le Monde du 28 mai 99, fustiger "le dénouement un rien naïf " [3] d'un roman qui "finit trop bien" [3]. Ou alors on peut "jouer le jeu avec Johnny pourquoi pas?" [3] et décider que ce roman dans lequel "Irving ne s’embarrasse pas d’êtats d’âmes" [3] tout en se livrant "à une méditation récurrente sur l’écriture et le pouvoir de la fiction" [3] est sinon "un formidable roman" [3], du moins ce "conte merveilleux" [4] qui, certains osent l'affirmer, "possède le souffle des meilleurs Irving" [4].

Sources :

[1] http://www.ratsdebiblio.net/irvingjohnuneveuve.html

[2] http://www.ratsdebiblio.net/irvingjohn.html

[3] http://rfl.ifrance.com/irving.html

[4] http://www.amazon.fr/exec/obidos/tg/detail/-/books/2020416417/reviews/ref=cm_rev_more_2/403-6343946-3474827

Pour la quatrième de couverture :

http://www.amazon.fr/exec/obidos/ASIN/2020416417/403-6343946-3474827

Autre source :

http://www.zazieweb.fr/site/fichelivre.php?num=494#Message55666

Extraits :

p.69 " Si, à quatre ans, Ruth Cole comprenait déjà que Thomas et Thimothy habitaient désormais un autre monde, Eddie trouvaient pour sa part qu'ils venaient d'un autre monde : ils avaient été aimés, eux."

p. 198 " Quand la source de ses écrits était autobiographique, il savait écrire avec autorité et authenticité. Mais quand il essayait d'imaginer, d'inventer, de créer, il ne réussisait pas aussi bien que lorsqu'il se servait de sa mémoire. C'est un handicap grave pour un écrivain ! "

p. 225 " Tandis qu'il commençait à parler d'elle et de son oeuvre, elle se laissa distraire par une question aussi familière que troublante : qu'est-ce qui me plaît durablement chez un homme ?"

p. 235 " C'était à Hannah que Ruth avait fait sa remarque vulgaire sur le charme de son père auprès des femmes : "On aurait entendu leurs culottes glisser par terre."

La première fois qu'Hannah l'avait rencontré, elle avait dit à Ruth : " C'es quoi, ce petit bruit ? Tu entends ?" Ruth voyait rarement venir une plaisanterie ; sa première idée était que tout le monde était totalement sérieux.

-Quel bruit ? Non, j'entends pas, avait-elle répondu en regardant autour d'elle.

-C'est rien, c'est ma culotte qui glisse par terre, avait répondu Hannah, et c'était devenu une phrase codée entre elles.

Chaque fois qu'Hannah présentait un de ses nombreux petits amis à Ruth, s'il lui plaisait, Ruth disait : "T'as entendu ce bruit ?" Et s'il ne l'emballait pas, ce qui était souvent le cas, elle disait : "J'ai rien entendu, et toi ?"

p. 248 " Mrs Dash trouvait méprisable de mettre les gens de sa connaissance dans ses romans ; elle y voyait une faillite de l'imagination- un romancier digne de ce nom doit pouvoir inventer des personnages plus intéressants que nature."

p. 252 "Il avait pour devise : "Soyons courtois deux fois." Ruth était d'accord sur le principe, mais elle trouvait le conseil difficile à suivre en pratique.

Selon Allan, on ignorait la première et la deuxième agression verbale. Mais si la personne vous provoquait ou vous donnait un signe d'hostilité une troisième fois, alors il ne fallait pas lui faire de cadeau. C'était peut-être un principe de gentleman, trop flegmatique pour Ruth."

p. 280  " Et puis c'était une fervente lectrice- on ne la voyait jamais sans un livre. Elle avait un jour confié à Ruth que si elle n'avait pas eu d'autres enfants, c'était qu'après la naissance d'Hannah elle avait tellement manqué de temps pour lire. Hannah confirma à Ruth que sa mère n'avait qu'une hâte, qu'elle soit assez grande pour s'amuser toute seule, et la laisser revenir à ses chers bouquins."

p. 297  " Pour elle, un roman évoquait une grande maison où le ménage n'est pas fait, une demeure en désordre ; sa tâche consistait à la rendre vivable, à lui imposer un semblant d'ordre."

p. 346  " Pourtant, il y a des sujets qui restent interdits aux femmes. Ce n'est pas sans rapport avec la dichotomie qu'on pratique quant à la vie amoureuse ; il est permis à un homme, voire considéré comme séduisant, d'avoir un passé amoureux, mais quand il s'agit d'une femme, elle sera bien avisée de garder le silence là-dessus."

p. 387  " Elle soutenait que le meilleur détail romanesque était le détail choisi, et non celui remémoré ; car la vérité romanesque ne se réduit pas à la véracité de l'observation -affaire du journalisme. Le meilleur détail, dans le roman, c'est celui qui devrait définir le personnage, l'épisode, l'atmosphère. La vérité romanesque, c'est ce qui doit arriver dans une histoire, pas forcément ce qui est effectivement arrivé dans la vie."

p. 561 "Harry savait ce qu'était la tolérance. Il n'aurait pas soutenu à Eddie ni à aucun de ses compatriotes que les Hollandais étaient plus tolérants que les Américains, mais c'était pourtant son sentiment. [...]

En Amérique, il n'y a pas de plus grande intolérance que celle qui frappe l'absence de réussite sociale, pensait-il."

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